Yann Reuzeau, son nom ne vous dit rien ?

Le garçon possède pourtant déjà un sacré pedigree. Celui d’un activiste de la scène gérant une salle de théâtre dédiée à la création contemporaine (La Manufacture des Abbesses dont il est le cofondateur avec Sophie Vonlanthen depuis 2006), jonglant avec de multiples projets tels que Mécanique Instable (2013-14), l’exploitation-fleuve de Chute d’une nation repris en 2015 au Théâtre du Soleil à l’invitation d’Ariane Mnouchkine, la création au même moment de De l’Ambition, suivie de Criminel en 2017-18 (inspiré de l’affaire Jacqueline Sauvage, joué à Paris et au Festival d’Avignon 2018 et 2019), tout en glanant au passage de jolies récompenses dont le Prix Beaumarchais du Meilleur Auteur ou encore le Prix Charles Oulmont !

 

Ce que j’aime, c’est explorer des mondes

Au début de son parcours, Yann Reuzeau travaillait surtout comme acteur, mais c’est l’écriture qui le tentait. S’il a grandi avec les livres, il a été “ forgé comme artiste par la musique ”, en particulier celle de Radiohead…: “ La capacité de ce groupe à prendre des risques et à se réinventer a joué un rôle fondamental à une époque où je me demandais où je voulais aller, et si j’étais, moi aussi, prêt à prendre des risques. ” dit-il.

Aujourd’hui Reuzeau, c’est avant tout un jeune dramaturge de convictions qui rencontre son époque, la percute avec un œil vif et acéré. Il explique: “ Notre métier n’est pas de convaincre, mais de raconter le monde, de provoquer une réflexion et du débat. Dans mes pièces, je me bats avec moi-même pour être le plus objectif possible, et ne pas imposer mes convictions aux spectateurs. ”

 

Et parce qu’il vit dans un monde anxiogène dont il refuse de subir les oukases sans broncher, il l’invite sur ses plateaux pour l’ausculter, continuant de nous surprendre avec des créations toujours plus éruptives. Pour preuve: sa nouvelle pièce Les Témoins, cette politique fiction cinglante comme une gifle à la dignité humaine ou quand la presse est violentée par la politique. Après Chute d’une nation, Les Témoins ouvre comme une plaie béante la question d’une société sans liberté de la presse avec une saisissante scène d’ouverture.
Car ses spectacles sont comme lui : électriques, haletants, en phase avec l’air du temps. Yann Reuzeau, un artiste de son temps.

F.L.