Anne Pilier, passionnée de culture, et de théâtre en particulier, coche toutes les cases du profil type du « spectateur » de théâtre bruxellois : c’est une femme, une habituée, de plus de 40 ans, mais, contrairement à l’amateur bruxellois qui se rend en moyenne 6 fois par an au théâtre, Anne s’y retrouve presque tous les soirs.
Au CCU, en priorité !
Françoise Laeckmann
Et nous l’avons croisée dans le Hall du CCU où, une fois de plus poussée par sa passion du spectacle, elle faisait son «marché» culturel.
Autodidacte culturelle
« C’est grâce au COVID que cette envie d’aller au spectacle nous est venue ! Avec mon frère Johan, après le décès de notre maman et les confinements qui ont suivi, on a ressenti une fringale de sorties et de culture. Comme un appel d’air. Un air d’ailleurs pour nous ouvrir l’esprit ».
Aller voir une pièce de théâtre, c’est une vraie sortie, c’est toute une aventure.
Ce soir, on va découvrir une nouvelle histoire, on va rencontrer des gens, peut être des amis, leur parler…On a hâte d’arriver, et si on ne sait pas encore si on va apprécier ou non ce qu’on va voir, ça fait partie du jeu…
« Au début, nous avons commencé par compulser les programmes des Centres culturels de Bruxelles sur Internet, et il y a de quoi faire! Nous habitons à Boitsfort, mais on a beaucoup de famille à Uccle où il y a le grand Centre culturel et dans nos critères, on voulait pouvoir se rendre au spectacle et laisser la voiture au garage. Avec le bus 41 qui nous amène directement depuis Boitsfort jusqu’à la rue Rouge à Uccle, on s’est dit que ce serait très pratique. De plus, les horaires de séances en soirée du CCU sont très sympas. On travaille tous les deux, et outre le samedi ou le dimanche, sortir le soir en semaine c’est intéressant. Avec sa chouette programmation, le Centre culturel d’Uccle était donc l’idéal pour que nos soirées au spectacle soient des moments de plaisir et de liberté où l’on oublie instantanément tout le stress du quotidien. Et les sièges y sont bien confortables ! (rires).»
La sortie au théâtre est souvent synonyme de rencontres. Entre spectateur·ices, avec les artistes ou encore avec l’équipe du théâtre. Ces moments d’échanges privilégiés sont au cœur de la culture de proximité avec les spectateurs et spectatrices, ce qui contribue grandement à l’expérience magique du théâtre.
« La première impression est très importante, tout comme l’accueil. Au CCU, Tamara de la billetterie est super, elle a vraiment pris le temps de nous écouter et de nous faire un abonnement sur mesure. Et il y avait du boulot, car la première fois que je suis arrivée chez elle, j’avais deux pages pleines de spectacles qu’on voulait voir ! Elle nous a gentiment orientés pour les meilleures places et les différentes dates… Résultat, et on a pu voir tout ce qu’on avait choisi : du théâtre, du cirque, de la danse et même des marionnettes. Pour le choix du spectacle en lui-même, on fait confiance à la programmation, on choisit un peu à l’instinct, on regarde juste le titre, ou presque, sans trop de détails … pour garder la surprise totale et le plaisir de la découverte. Par exemple, dans la nouvelle saison, on a sélectionné Maman, avec Vanessa Paradis, l’idole de notre génération (rires), un peu par curiosité : jouera-t-elle aussi bien qu’elle chante ? Sera-t-elle différente de l’actrice de cinéma ? On verra. En attendant, on ne sait rien de l’histoire ! »
Soudain, une foule, de la lumière : nous voilà déjà arrivés devant le théâtre. Tout de suite, on oublie tout pour plonger dans un autre monde. On retrouve quelques amis venus pour assister à la pièce avec nous, ou peut être que l’on prend simplement le temps d’apprécier toute cette effervescence, et l’attente excitée qui se dégage de la foule. Enfin, c’est notre tour. On tend notre billet à l’ouvreur qui le déchire, « Bon spectacle ! », merci et nous voilà propulsés dans la grande salle du CCU. Un petit arrêt côté régie son et lumière et puis l’espace s’ouvre devant nous : le plafond haut, les murs lambrissés, les appliques d’époque, les sièges en velours rouge qui s’étalent devant nous, la scène. Happé par cet espace envoûtant, on avance, on trouve notre place et on attend que tout le monde soit installé.
Enfin, le spectacle peut commencer. Les lumières sur les gradins s’éteignent doucement, la scène s’allume, et nous voilà plongés dans un tout autre univers, haut en couleur et en relief. Les acteurs en face de nous sont bien réels. Mais on ne sait jamais quelles surprises nous sont réservées.
« Je fais de la décoration florale et mon frère de la restauration de meubles, on connaît donc la création, l’investissement personnel et le temps que tout cela demande au comédien. Je suis admirative et je profite à 100% de leur présence sur scène, de la magie et des émotions qu’ils nous transmettent. Et ils nous en donnent beaucoup. Le décor aussi peut nous provoquer des émotions : la surprise, l’étonnement ou le malaise …Au théâtre, tout est presque magique».
Dans la salle, l’atmosphère est détendue et décontractée. Ou pas. Les gens rient entre eux ou retiennent leur souffle, ce soir le public est local et familial (ndlr : on est loin d’un petit théâtre de quartier : la grande salle accueille plus de 800 places !) : tous réunis pour assister à un spectacle vivant !
« Le théâtre, c’est une fête pour moi. Bien sûr, il arrive qu’on voie des pièces qu’on a moins aimées, comme il m’arrive parfois de revoir un spectacle pour l’envisager sous un autre jour, car chaque représentation est unique. Mais le théâtre reste un endroit de paix, de rencontre, de partage d’émotions. Quand il fait moche, c’est aussi s’obliger à sortir. Je sais qu’il y a des choses à la télé ou sur Internet mais ce n’est pas du vivant, ça ne m’apporte rien ! »
Le spectacle se termine, la salle applaudit, les acteurs saluent, remercient les techniciens, sortent de scène et le public de la salle. Certains s’attardent à discuter dans la salle, encore étourdis de ce qu’ils viennent de voir, de vivre.
«Nous, après le spectacle, on aime se retrouver au bar pour papoter autour d’un verre ou alors on va manger un morceau pour prolonger l’agréable soirée et se réjouir du prochain spectacle à découvrir. C’est ça la culture, non ? » conclut joliment Anne Pilier.