La pièce se déroule dans les années 60 au cœur d’un village. Robert la cinquantaine, dégarni, bedonnant et mal dans sa peau vit avec sa maman Odette. Il tente de mettre au point une machine à téléporter.
Comme dans le film de Cronenberg, tiré lui-même de la nouvelle de George Langelaan, on assiste au quotidien de ce drôle de couple, ponctué par des expériences de téléportations plus ou moins réussies. Le processus de déshumanisation, déjà entamé dans cette vie sans âme, se poursuit jusqu’à son terme atroce – métaphore de notre pauvre condition humaine ou simple pochade ambiguë ?
Travail corporel, effets spéciaux, esthétique vintage, inventivité débridée et poésie noire, La Mouche est un laboratoire d’expérimentations scéniques et visuelles, un extraordinaire terrain de jeu, moral et visuel. On en tremble encore …
On frémit et on rit, beaucoup, devant ce mariage heureux de science-fiction et de comédie douce, mais franchement fêlée.
Un duo irrésistible. Un spectacle aux 3 Molières !
Récompensé par trois Molières en 2020 (meilleur comédien Christian Hecq, meilleure comédienne Christine Murillo et meilleure création visuelle), ce spectacle est tout à la fois loufoque, saisissant et terriblement intriguant.
Christian Hecq est sociétaire de la Comédie-Française depuis 2013. Il a reçu les Molières de la révélation masculine (2000), du meilleur comédien (2011) et de la création visuelle (2016). Au cinéma il a notamment tourné sous la direction de Jaco Van Dormael, Albert Dupontel, Chantal Akerman, François Boucq…
Entre poésie décalée et tendresse trash, le cocktail improbable témoigne d’un humour sans arrière-pensée, dont la sincérité fait mouche à chaque instant.
Les Inrockuptibles
Popularisée par le film de science-fiction horrifique de David Cronenberg en 1986, la nouvelle La Mouche, de George Langelaan (1957), s’offre une seconde vie au théâtre. Valérie Lesort et Christian Hecq en livrent une adaptation inventive et comique. L’un des temps forts de la rentrée théâtrale, déjà gratifié de trois Molières.
Robert est un quinquagénaire bedonnant, peu sociable et vieux garçon. Dans le garage de la maisonnette qu’il occupe avec sa mère, l’étouffante Odette, il passe ses journées à mettre au point son grand œuvre : une machine de téléportation pour laquelle il ne lui manque qu’un cobaye humain… Lequel est vite trouvé en la personne de Marie-Pierre, une vieille amie d’Odette un peu gourde, qui disparaît dans les limbes de l’espace-temps. Tandis que l’inspecteur Langelaan se lance sur ses traces, l’apprenti scientifique, après une énième expérimentation ratée, mute peu à peu en insecte. La metteuse en scène et marionnettiste Valérie Lesort et le comédien belge Christian Hecq, sociétaire de la Comédie française, s’emparent d’un motif connu et lui offrent un tout nouveau destin : superbement propulsé dans les années 1960, avec papier peint fleuri, table en formica et transistor, La Mouche virevolte dans le burlesque grâce à moult trouvailles scéniques.
Kafka chez Strip-tease
Plus stupéfiant encore que les effets visuels, Christian Hecq, maître en mimiques, fait basculer imperceptiblement la pièce de l’humour vers plus de noirceur au fil de sa tragique métamorphose. On trouvera ici un peu de Kafka, de Deschiens et beaucoup Strip-tease, puisque l’hommage au cultissime épisode La Soucoupe et le perroquet est parfaitement assumé. Comme dans l’émission belge, on garde au cœur la solitude de nos anti-héros, une fois le rideau tombé.
lm-magazine.com, 1er octobre 2021